lundi 28 janvier 2013

« Universités publiques ivoiriennes : quel Étudiant Nouveau pour un Départ Nouveau ? (*) »






« Autour de moi, une jeunesse malpropre considère l'ignorance comme un devoir. »

Alain BOSQUET, La fable et le fouet, Paris, Gallimard, 1995, p. 83

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Le lundi 3 septembre 2012 sera indubitablement une date mémorable donc historique pour toute la jeunesse estudiantine ivoirienne. En effet, c’est ce jour que s’est faite l’ouverture officielle des universités ivoiriennes rénovées après plus d’un an de fermeture pour cause de réhabilitation. Comme l’a dit le Chef de l’Etat « La décision de les fermer a été l`une des plus difficiles à prendre mais elle était nécessaire». La facture aussi est très salée : 110 milliards (selon AFP) gérés par le Programme Présidentiel d’Urgence. Il n’est point besoin de démontrer que les plus hautes autorités ivoiriennes sont préoccupées par le challenge de la remise en marche d’universités ivoiriennes dignes de ce nom. C’est un défi pour elles. Cet article n’a pas la prétention d’être exhaustif ou d’épuiser la question. C’est juste une contribution afin de susciter le débat sur la problématique essentielle de l’émergence du modèle de l’étudiant nouveau avec le départ nouveau annoncé dans les universités publiques ivoiriennes. Car il faut bien le dire, l’étudiant ivoirien n’a pas bonne presse et surtout une image positive dans l’imagerie collective nationale et même internationale.


Les NTICs et la formation de l’Etudiant Nouveau

« L’analphabète du XXIè siècle sera celui qui ne saura pas utiliser un ordinateur. » avait prévenu Bill Gates, le richissime américain fondateur de la célèbre Microsoft. Les nouvelles technologies de l’information et de la communication ont révolutionné la manière de comprendre et de gérer le monde. On parle même aujourd’hui de gouvernance électronique. Dans plusieurs pays développés les NTICs sont utilisées pour promouvoir le développement durable en essayant de réduire la consommation de papiers dans les services publics et privés. En Europe cela a même créé un débat sur ce qu’on appelle la « e-démocratie ». (Cf. Moustapha MBENGUE, « Contribution de l’Internet à l’affirmation de la démocratie en Afrique noire francophone : le cas du Sénégal », Thèse de Doctorat en Science de l’Information et de la Communication Université Paris VIII Vincennes-Saint Denis, 334 p. soutenue le 20 octobre 2009 Sous la direction du Pr. Claude BALTZ, accessible sur internet ; Dominique BOURG, Kerry WHITESIDE, La démocratie Internet. Le citoyen, le savant et le politique, La République des idées/Seuil, 2010) Concernant l’université ivoirienne, qui se veut innovante, c’est une aubaine à ne pas rater.


Facebook, Twitter et blogosphère

Les réseaux sociaux sont devenus tellement influents que plusieurs d’entre nous internautes en avons fait presqu’une confidente. Sans souscrire à la thèse qui voudrait que l’émotion soit nègre et la raison hellène, les jeunes africains dans leur immense majorité n’ont retenu que de ceux-ci (facebook et twitter) que leur utilisation « émotionnelle ». Pendant qu’ailleurs ils ont été le vecteur de changements et de mobilisation pour des causes citoyennes (Révolution en Tunisie, mouvement « Y en a marre » au Sénégal), ici (en Afrique noire) on utilise ces puissants moyens de communication comme autocélébration personnelle. Ces réseaux sociaux sont utilisés pour faire sa publicité c’est-à-dire montrer et partager ses photos, s’enorgueillir de sa suffisance matérielle ou physique etc. certains mêmes à des fins condamnables comme des arnaques et autres faits cybercriminels.
Pour cet étudiant nouveau que nous appelons de tous nos vœux, ces réseaux sociaux devront servir de tremplin à l’acquisition de nouvelles connaissances et pour l’organisation de débats enrichissants et constructifs. Par exemple chaque niveau de chaque faculté ou d’UFR devrait impérativement créer un groupe sur facebook ou un blog pour faire partager en temps réel des informations de dernière heure comme les changements de salles de cours, des dates de compositions, l’absence ou la disponibilité d’un enseignant et aussi et surtout des conseils et astuces pour mieux comprendre un cours ou traiter un sujet. On utilisera aussi les forums pour organiser des débats et faire des sondages et des propositions en vue de l’amélioration de certains services de nos UFR : liste de travaux dirigés, affichage de résultats, réclamations après les compositions, corrigés d’exercices et autres exposés à déposer…
Nous suggérerons une utilisation « massive » d’un outil bien connu de communication en l’occurrence « skype » en vue de permettre aux étudiants d’échanger entre eux et surtout avec les enseignants sur des sujets utiles comme par exemple des cours ou des sujets importants ayant un lien avec sa formation. Des enseignants pourraient même enregistrer leurs cours en format audio ou des explications approfondies pour les mettre sur ces réseaux sociaux ou sur youtube par exemple. Dans ce cas au lieu de mettre des musiques dans leurs gadgets high tech (portables, ipad, iphone …), les étudiants devront télécharger ces cours audio.
C’est le lieu de manifester notre infinie gratitude au gouvernement et surtout au Chef de l’Etat pour avoir installé des bornes wifi sur les campus en vue d’un accès gratuit à une connexion internet d’une exceptionnelle qualité. Mais nous pensons que cela doit être accompagné d’une politique pour faciliter l’acquisition d’ordinateur portable ou de mini-ordinateur par les étudiants condition sine qua none pour faire profiter un maximum d’étudiant. Cela a bien marché au Sénégal par exemple. Cela permettra à l’étudiant qui se voudrait sérieux et consceint de multiplier ses sources d’acquisition de connaissances nouvelles et de se perfectionner en usant avec intelligence de cet outil, internet, dont on ne mesure pas encore pleinement l’efficacité sous nos tropiques. Il pourra même entrer en contact avec des condisciples d’autres pays dont il partage les mêmes intérêts. Il faut cependant mettre en garde contre certains comportements qui pourraient mettre à mal les innovations annoncées : nous voulons parler de l’épineuse question de la piraterie et par conséquent celui des téléchargements illégaux de musiques. Des esprits simplistes pourraient nous reprocher cette mise en garde. Même dans plusieurs pays occidentaux ce problème se pose avec acuité actuellement au point où en France cela a du faire l’objet de débats et de vote de loi au parlement même. On pourra aussi mettre en garde le personnel d’encadrement et les enseignants contre ce qu’on pourrait appeler « la tricherie ou la fraude high-tech ». Il s’agit ici d’aller au-delà de la tricherie classique lors des exercices et compositions mais celle par exemple des mémoires de recherche de fin de cycle qui pourraient résulter de plagiats. Des milliers de travaux de recherches sont en ligne, la tentation sera grande. Si même des enseignants ont été soupçonnés dans ce domaine, c’est qu’il faut se méfier aussi de leurs disciples qui somme toute sont souvent des partisans du moindre effort. C’est connu.  Cela veut incontestablement dire que la question est importante ne mérite donc pas d’être rejeté aux calendes grecques.

Quelques suggestions pour la naissance de l’étudiant nouveau :
-être responsable et savoir qu’il a obligation de résultats en matière d’excellence et de mérite car la société ivoirienne a le droit et même le devoir d’exiger de lui des engagements après un tel « sacrifice » des contribuables pour lui offrir les conditions « idéales » d’étude et de travail,
-Faire la promotion de la saine émulation en rivalisant en excellence dans sa faculté ou son UFR,
-respecter l’administration et le Maître. Avoir pour ce dernier une admiration et un respect perpétuels en l’ayant constamment comme modèle,
-  ce dernier doit savoir qu’il n’y a pas d’avenir par procuration ou pour être plus clair on ne construit pas l’avenir à la place de quelqu’un. Chacun est maître de son destin,
-être un lecteur perpétuellement affamé car comme le dit l’écrivain français Marcel Proust le goût de la lecture croît avec l’intelligence,
-pour les réseaux sociaux et autres blogs, un étudiant pourra suggérer la consultation de sites internet à ses amis et aux enseignants en mentionnant l’adresse url ou le raccourci,
J’espère que la jeunesse estudiantine sera à la hauteur du défi et de l’espérance que la société ivoirienne attend d’elle. Et comme le disait Mahatma Gandhi, étudiant ivoirien : « Sois le Changement que Tu veux voir dans le Monde. » Ce n’est pas un choix, c’est un Devoir.

(*)Publié par le quotidien gouvernemental Fraternité Matin en deux parties en ses numéros 14.459 et 14.460 du samedi 6 et lundi 8 octobre 2012 à la page 3 dans sa rubrique « Débats et Opinions »



(*) Extrait du tapuscrit d'un opuscule en préparation : Pour l'avènement de l'Etudiant Nouveau

« Qu’est-ce que la PAIX ?(*) »



« La paix, ce n’est pas un vain mot, c’est un comportement. » 
«On n’oublie souvent qu’il est plus facile de faire la guerre que de faire la paix. Et quand le dialogue n’a pas fait l’économie de la guerre un jour il faudrait mettre fin à cette guerre. Il faudrait recourir à la négociation et au dialogue mais dans des conditions difficiles après la destruction de tant de vie humaine et de biens matériels. »
Félix HOUPHOUËT-BOIGNY  


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            Qu’est-ce que la Paix ? D’ailleurs pourquoi une telle question devrait-elle être posée. Laissons Paul Veyne nous proposer une réponse digne d’intérêt : «Non le débat n’est pas vain de savoir si l’histoire est une science, car « science » n’est pas un noble vocable ; mais un terme précis et l’expérience prouve que l’indifférence pour le débat de mots s’accompagne ordinairement d’une confusion d’idées sur la chose.» Ainsi s’interrogeait-il dans son ouvrage Comment on écrit l’histoire. Ne serait-il pas légitime d’en faire de même pour la Paix ? Nous n’en doutons pas. Aussi il est obligatoire mener ce débat au moment où nous entendons encore des bruits de guerre et des rumeurs de reprise de la guerre. De plus, il est de plus en plus d’intellectuels qui constatent une progression de l’incertitude dans la Pensée. Selon leurs thèses nous sommes de plus en plus incertain des acquis des sciences dont nous étions sûrs il n’y a pas si longtemps. Les Anciens Romains affirmaient : « Sapiens nihil affirmat quod non probet (1)». Edgar Morin, éminent sociologue et philosophe français, ardent promoteur de la « pensée complexe » (Cf. MORIN Edgar, Introduction à la pensée complexe, Paris, Seuil, 2005, 158 p) écrivait quant à lui: « Tout, dans ce monde est en crise. Dire crise, c’est dire, nous l’avons vu, progression des incertitudes. Partout, en tout, les incertitudes ont progressé.(2)» Etant un étudiant en Histoire et de surcroit passionné de l’Antiquité, c’est donc naturellement cette période qui inspirera notre réflexion.  Disons d’abord que c’est une entreprise périlleuse et risquée de disserter sur la Paix car c’est une notion complexe qu’illustre son étymologie. Ensuite il est moins aisé de penser la Paix que la guerre car elle passe inaperçue, sauf lorsqu’elle est menacée ou lorsqu’elle est ardemment souhaitée en temps de guerre. On ne pense plus à la Paix lorsqu’on en jouit. La guerre est facile à connaître. Elle exerce même une fascination sur les hommes, au point que l’Histoire n’a d’abord retenu du passé que les batailles et les récits des guerres. Sur 3400 ans d’Histoire connue et maitrisée de l’humanité, les humains n’ont vécu qu’environ 240 années de Paix.  L’imaginaire humain est donc davantage occupé par la guerre que par la paix. Une comparaison l’illustre. Pour désigner l’homme de guerre, celui dont la guerre est le métier, il y a un mot : le « guerrier ». Il n’y a pas d’équivalent pour désigner l’homme de paix, susceptible de promouvoir la paix et de veiller sur elle, ou plutôt il y a deux termes insuffisants : le « pacificateur » qui réussit à mettre fin à une guerre ; le « pacifiste » qui, épris de paix, n’est pas déséquilibré dans notre imaginaire et dans notre inconscient, où la guerre a occupé pendant des siècles une place privilégiée par rapport à la paix. Pour illustrer cette dissymétrie, consultons les dictionnaires et les index. Dans le Grand Larousse en cinq volumes, le mot « guerre » a droit à 120 lignes de texte, le mot « paix » à 40 lignes. Dans le Dictionnaire des citations françaises, il y a 99 entrées sur la guerre, 33 sur la paix. Dans l’ouvrage de Raymond Aron, le titre bien balancé Paix et guerre entre les nations (1961) laisse présager un bel équilibre entre les deux notions ; or, dans l’index, on compte 120 entrées pour le mot « guerre », 40 pour le mot « paix ».  Définir la paix par rapport à la guerre n’est pas satisfaisant. Il existe des situations de non-guerre qui ne sont pas la paix. D’où de nombreuses tentatives pour mieux cerner la paix. De la recherche de la paix, on passe aux recherches sur la paix, qui suivent deux orientations. Ainsi donc des sociologues inventent deux néologismes dans le cadre de leurs recherches :
La polémologie, néologisme créé par le sociologue français Gaston Bouthoul. Elle a pour objet l’étude scientifique des guerres, des paix et des conflits, selon l’adage « Si vis pacem, stude bellum » (Si tu veux la paix, étudie la guerre). Bouthoul propose une définition statistique : «  La paix est l’état d’un groupe humain souverain dont la mortalité ne comporte pas une part importante d’homicide collectifs organisés et dirigés. »
               L’irénologie, suivant le précepte du sociologue norvégien Johann Galtung, qui distingue la paix négative – c’est-à-dire l’absence de guerre – et la paix positive, qui repose essentiellement sur la justice : « Si tu veux la paix, agis pour la justice ».
Revenons donc à la conception antique de la paix en nous demandant que pensaient les Anciens de la Paix ? En effet, Grecs et Romains, avaient plusieurs divinités allégoriques auxquelles ils vouaient des cultes(3). Ainsi en est-il de la Victoire, la Santé, la Sagesse, l’Espérance, l’Amitié, Mnémosyne ou la Mémoire, la Discorde et bien sûr la Paix. Cette dernière, la Paix, a été divinisé par les Grecs sous le nom d’Irène «Ειρήνη (Eirénè)». Aristophane donne à la Paix, pour compagne, Vénus et les Grâces. Dans la mythologie, Eirénè est la fille de Zeus (dieu suprême du panthéon grec) et Thémis (déesse de la Justice), l’une des trois (ou cinq) Heures(4) et incarne la Paix.  Eirénè était donc la déesse de la Paix et aussi la saison du printemps (EIAR, eiarinos). Eirénè est l’une des trois Horai, déesses des saisons et gardiennes des portes du paradis. Ses sœurs étaient Eunomia (la justice humaine dans son aspect légal, c'est-à-dire la Loi et l'Ordre) et Dicé (ou Diké « Δίκη » / Dikê) qui est une divinité de la mythologie grecque, personnifiant la justice humaine dans ses aspects moral et pénal. Son ennemi était Polemos « Πολεμοσ »(le désordre) à ne pas confondre avec Eris, déesse de la Discorde et Arès, dieu olympien de la guerre. Les statues de l’art classique la représentent comme une belle jeune fille tenant dans ses bras l’enfant Ploutos, dieu allégorique représentant la Richesse et la Corne d’abondance. D’autres statues la représentent comme une jeune femme tenant dans la main gauche, une corne d’abondance et dans l’autre un rameau d’olivier, un flambeau renversé ou le caducée d’Hermès, dieu protecteur des voyageurs et des voleurs. Elle porte souvent des épis de maïs symbolisant la richesse et la prospérité. On peut voir aussi Ειρήνη (Eirénè) représentée en train de brûler une pile d’armes. Elle déteste la vue du sang c’est pourquoi on lui fait des sacrifices avec des fruits. Ou tous sacrifices non sanglant le seizième jour du mois Hécatombeion. Des lieux de culte lui ont été dédié à Athènes, où sa statue la représente tenant Ploutos enfant dans les bras, cette statue se trouve près de celle d’Amphiaraus, l’autre a été construite auprès de celle d’Hestia, déesse grecque du Foyer. A Rome, Auguste lui consacra en 139 av. J.-C., au Champ de Mars, le grand autel de la Paix Auguste; en l’an 75, Vespasien dressa à la déesse, au Nord-Est du Forum, un temple magnifique, ceint d’une esplanade, le Forum de la Paix. Le mythe dit qu’elle voulut garder sa virginité mais Zeus la força à l’épouser. Abordons à ce stade de notre propos l’étymologie du mot paix. De la paix, nous pouvons dire, en paraphrasant ce que Pascal écrit du bonheur, que tous la cherchent…même ceux qui font la guerre. Disons brièvement que le mot vient du latin pax. Il est dérivé du verbe pango, -ere-, qui signifie « planter, enfoncer, établir » (par exemple des limites). Mais aussi « écrire » (des œuvres). Cette racine nous indique en quel sens les Anciens entendaient la paix : comme quelque chose qui n’est pas donnée, mais que l’on fait, par un geste, quelque chose qui n’est pas fragile mais solide ou durable, quelque chose qui passe par des mots, et spécifiquement par des mots écrits, un « pacte ». Selon l’Abbé Patrice Jean Aké, enseignant à l’Université Catholique d’Afrique de l’Ouest à Cocody dans une intéressante communication intitulée justement « Qu’est-ce que la paix (5)» d’après le Dictionnaire étymologique d’Albert Dauzat, le mot ˋˋpaixˊˊ s’écrivait pais et a été introduit dans la  langue française du XIIe siècle dans La chanson de Roland. Le mot ˋˋpaixˊˊs’est écrit avec x, d’après le latin, et à l’accusatif est devenu pacem. Dans le Nouveau dictionnaire latin-français, pax veut direˋˋpaixˊˊ et à de multiples usages comme faire la paix avec quelqu’un, avoir la paix, conclure la paix, vivre en paix. Ainsi la paix va de la paix entre les citoyens à la paix de l’âme. Pour Dominique Pire : « Définissons la paix positive comme étant le commencement de la compréhension mutuelle, du respect et de l’appréciation de l’autre en tant que différent de nous. La paix positive, c’est que j’appelle la coexistence des esprits et des cœurs. La définition de la paix positive que je viens de formuler vaut tout autant pour la paix entre groupes, nations, blocs, etc., que pour la paix entre individus.(6)»
Bien prétentieux serons-nous si nous prétendions avoir épuisé l’analyse de cette question. Au terme de cette humble réflexion, nous voulons dire simplement que nous avons voulu contribuer autant que peut faire ce peut aux efforts des acteurs de promotion pour une paix durable dans le monde. Nous savons bien les limites de cet article, nous sommes bien conscient que le lecteur aurait bien voulu lire nos propositions concrètes pour la construction de cette Paix. Car à l’évidence c’est le plus urgent actuellement dans cette « société de belligérance, de défiance et de méfiance » qui se voit dans notre pays. Si le temps nous le permet, nous le ferons occupé à l’achèvement de nos nombreux tapuscrit. Nous espérons tout au moins que cette réflexion vous fera prendre conscience de la nécessité et de l’indispensabilité de Penser la Paix dans ses différents aspects.
Permettez-nous donc cher Lecteur de terminer par ces deux célèbres pensées qui m’inspirent chaque jour :
« Notre Vie de chaque jour est notre Temple et notre Religion » Khalil GIBRAN, Peintre, Poète et mystique musulman.
 « Sois le Changement que Tu veux voir dans le Monde. » Mahatma GANDHI, apôtre de la non violence




NOTES

(1)- « Le sage n’affirme rien qu’il ne soit en mesure de prouver »
(2)- MORIN Edgar, Pour entrer dans le XXIè siècle, Paris, Seuil, 2004, p. 341
(3)-Cf. COMMELIN Pierre, Mythologie grecque et romaine, Paris, Pocket, 1994, quelques divinités allégoriques pp. 423 à 442. Voir également la pièce théâtrale d’Aristophane, La Paix, écrite en – 431 dont Trygée est le héros. En pleine guerre du Péloponnèse, le vigneron athénien Trygée, monté sur un escabeau pour demander aux dieux le moyen de mettre fin à la guerre, escalade l’Olympe. Il apprend que Polemos, a jeté Irené, la Paix, au fond d’une caverne. Aidé par ses concitoyens, il réussit à la délivrer et laisse éclater sa joie tandis que se désolent les marchands de casques, de trompettes et de javelots.
(4)- Horai signifie ‘’portion de temps’’, ‘’saison’’, ‘’heure‘’. Les Horai sont les gardiennes des portes de l’Olympe, les déesses des saisons et ce sont elles qui découpent le temps en portion. Elles sont les déesses de l’immortalité et les gardiennes du nectar et de l’ambroisie, boisson et nourriture des dieux. Eunomia, Diké et Eirénè. Elles ont sont particulièrement honorées par les agriculteurs.
(5)- Abbé Patrice Jean Aké, « Qu’est-ce que la paix ? », in Paix, Violence et Démocratie en Afrique, Paris, L’Harmattan, 2003, pp. 267 à 277. (Actes du colloque d’Abidjan, du 9 au 11 janvier 2002)
(6)- Dominique Pire, Bâtir la paix, Bruxelles, Verviers, Gérard & Cie, 1966, p. 61





(*) Extrait du tapuscrit d'un livre en préparation, Pour l'Avènement de la Paix en Côte d'Ivoire.

(*)Publié par le quotidien gouvernemental Fraternité Matin en deux parties en ses numéros 14.329 et 14.330 du samedi 1er et lundi 3 septembre à la page 3 dans sa rubrique « Débats et Opinions »


« Pourquoi est-il indispensable d’apprendre à parler en public ? (*)»



On ne naît pas orateur, on le devient. Jetez vous à l'eau et apprenez à Parler !

« Apprendre à bien Parler, c’est Apprendre à Bien Vivre. »
ISOCRATE (436-338 av. J.-C.), célèbre Orateur et enseignant grec.




 « La crainte de l'échec ne saurait paralyser le goût de l'effort, et un naufrage ne donne pas forcément raison aux navires qui refusent de prendre la mer. »
Dr. Simplice DION, auteur de l’ouvrage : Les Paroles ou les balles. Convertir ou punir le tyran, Éditions Balafons, 2012

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Les philosophes et spécialistes de la communication qui ont planché sur la question sont sans appel : au moins 85 % de notre réussite dans la vie dépend de notre habileté à communiquer avec les autres. S’il est évident qu’il y a plusieurs moyens de communication, aucun n’est plus utilisé et plus efficace que la Parole. Dans l’un de ses célèbres ouvrages intitulé Comment trouver le leader en vous Dale Carnegie ne dit pas le contraire : « Les idées les plus brillantes au monde sont sans valeur si vous ne les partager pas. (…) C’est la capacité relationnelle qui stimule les autres. C’est elle qui transforme de grandes idées en action. C’est elle qui rend tout possible.(1)» « A quoi sert d’avoir des idées si on ne sait pas les exprimer ? » demandait Epictète le stoïcien. Fonction intellectuelle et spirituelle, la Parole marque l’homme dans son caractère social et le démarque de l’animal. Après le travail et le sommeil, c’est à la Parole qu’il consacre le plus grand nombre d’heures dans une journée, à la dire ou à l’écouter. Moyen d’expression et de communication indispensable, la Parole permet donc de marquer la société de sa personnalité et de multiplier ses contacts avec ses membres. Selon Martin Heidegger « L’être humain parle. On dit que l’homme possède la Parole par nature. L’enseignement traditionnel veut que l’homme soit, à la différence des plantes et de la bête, le vivant capable de Parole. Cette affirmation ne signifie pas seulement qu’à côté d’autres facultés, l’homme possède aussi celle de parler. Elle veut dire que c’est bien la parole qui rend l’homme capable d’être le vivant qu’il est en tant qu’homme. L’homme est homme en tant qu’il est celui qui parle, Guillaume HUMBOLT, l’a bien dit.(2)» Voilà qui est clair. En outre, le Verbe est l’architecture de l’humanité (Cf. Genèse I, 3). Selon le mythe grec, c’est Zeus qui apporta, par l’entremise d’Orphée, l’art oratoire en plus de la politique aux hommes, afin qu’ils ne se détruisent pas mutuellement car Prométhée venait de leur donner le feu qu’il a volé dans les forges d’Héphaïstos, dieu olympien du feu et des forgerons. C’est donc l’origine mythique des arts prométhéens ou de la technique. L’éloquence est dans son essence un principe de Culture et de Civilisation. Le Dr. Simplice DION, enseignant-chercheur à l’université de Cocody, (Président du Concours National d’Art Oratoire) aime à dire qu’« Il faut prescrire les armes de la dialectique et proscrire la dialectique des armes. » Combien ne sommes-nous pas déçu quand nous écoutons une importante personnalité pourtant reconnue, respectée, et réputée dans la société comme étant l’une des meilleures dans son domaine de compétence, mais qui a des difficultés quand il s’agit de parler en public. Je sais que vous voyez le scénario. Pas de commentaire !

Les sophistes d’Athènes affirmaient que « tout se dispute et se discute, dans un universel retournement des arguments.» Quoi qu’on leur reproche les sophistes ont le mérite d’avoir été les « premiers mercenaires »  du Verbe. Platon à multiplié les critiques contre eux et ils ont été pour responsables de la crise morale qui traversa Athènes. Le mot même de sophiste a vite pris une valeur péjorative qu’il a gardée. Jacqueline de Romilly les réhabilite en ces termes : « les sophistes sont les premiers à avoir fait de la relativité des connaissances un principe fondamental et à avoir ouvert les voies no seulement de la libre pensée, mais au doute absolu dans tout ce qui est métaphysique, religion ou morale(3)»  Selon Aristote, la rhétorique est un instrument de culture, un art de dire et de vivre. Le travail lucide sur l’art de persuader est donc un humanisme. Pour ce dernier, la « rhétorique consiste dans la faculté de découvrir tous les moyens possibles de se faire croire sur tous sujets; la dialectique est l’art de la discussion organisée, l’instrument des sciences, la rhétorique, l’art du discours public, l’instrument de l’opinion, l’éristique l’art de la controverse. » Et Cicéron de renchérir : « C’est notre unique, ou meilleur avantage sur les bêtes sauvages, que de parler entre nous et de pouvoir, par le langage, exprimer nos sentiments. Aussi rien n’est plus admirable, rien ne doit mériter plus d’efforts que de vaincre les hommes eux-mêmes, là où ils l’emportent sur les bêtes. (De Oratore, 1, 8, 30)»

Permettez-moi ce conseil : ne refusez jamais les occasions qui se présentent à vous de parler en public. C’est en pratiquant ce qu’on apprend théoriquement qu’on s’exerce et s’améliore. Plus vous vous exprimerez devant un auditoire, plus vous apprendrez à manier cet outil suprême d’influence, de commandement et de communication qu’est la Parole. Le triptyque de l’art oratoire consiste à CONVAINCRE, ÉMOUVOIR et faire MOUVOIR les Hommes pour atteindre des objectifs. Retenez-le : il n’y a pas d’orateur né par conséquent on ne naît pas orateur, on le devient. Tout réside dans l’apprentissage et l’entrainement dans l’action. Parler en public n’est pas un droit, c‘est un privilège. Il faut donc le mériter et s’en montrer digne. Savoir parler cela coûte, il faut le savoir. L’objectif n’est pas d’être plus brillant que les autres mais d’être meilleur que vous ne l’êtes aujourd’hui. Suivons l’exemple du Grec Démosthène (comme Aristote il naquit en 384 et mourut en 322 av. J.-C.) qui dut accomplir bien des efforts pour savoir parler en public : « il se mit des cailloux dans la bouche pour travailler l’articulation, hurla contre les flots afin d’acquérir de la puissance vocale, s’enferma et se rasa le crâne pour mieux travailler, se piqua l’épaule avec la pointe d’une épée dans le but de corriger un tic nerveux, il fit des folies pour réussir à être écouté ! » Alors en cas de découragement, penser à Démosthène. Dès lecture de ce texte, mettez vous à l’œuvre et apprenez à parler. 
 
En guise de conclusion, méditons ensemble cette vérité éternelle énoncée par Napoléon HILL, célèbre auteur américain du best-seller Réfléchissez et devenez riche : «Après avoir étudié plus de 25.000 cas d’échec, on a pu démontrer que le MANQUE DE DÉCISION venait presque toujours en tête de la liste des 30 causes majeures de l’échec. L’INDÉCISION est un ennemi que, presque tous, nous avons à vaincre. » 


NOTES :
1)- CARNEGIE Dale, Comment trouver le leader en vous, Madrid, Litografia Roses, 2009, p.30
2)- HEIDEGGER Martin, Acheminement vers la Parole, Gallimard, 1981, p.13
3)- ROMILLY Jacqueline de, Les grands sophistes dans l’Athènes de Périclès, Paris, Editions de Fallois, 1988, p.338




(*) Publié par le quotidien gouvernemental Fraternité Matin le lundi 11 février 2013 dans la rubrique « Le Débat du jour » page 2, N°14. 460